Comment arrivent-ils à piller les nids de Guêpes

[maloute45]

Ce rapace possède-t-il des répulsifs chimiques naturels ou bien sa technique de pillage
est - elle particulièrement efficace ?


Caracara à gorge rouge (Ibycter americanus).
Source : McCann et al. (2013) / Simon Fraser University

Le Caracara à gorge rouge (Ibycter americanus) est une rapace sociable d'Amérique tropicale qui
se nourrit principalement de larves d'abeilles et de guêpes (elles représentent de 59 à 77 % de
la nourriture donnée aux poussins durant la nidification), comme les bondrées (genre Pernis).

Certains auteurs avaient avancé l'idée que les caracaras possédaient des répulsifs chimiques
leur permettant d'attaquer sans difficulté apparente les colonies d'hyménoptères.

Pour déterminer comment ces oiseaux parviennent à se nourrir de larves de guêpes et s'ils sont
protégés chimiquement, des chercheurs de la Simon Fraser University (Canada) ont étudié les
Caracaras à gorge rouge près du camp des Nouragues en Guyane française.
Ils ont installé des caméras autour de nids d'hyménoptères et ils ont filmé les rapaces durant
leurs attaques .
Ils ont aussi analysé la peau nue de leur face, la surface de leurs pattes et leurs plumes.
Ils ont enfin infligé expérimentalement des dommages mécaniques à des nids de guêpes pour
observer leur comportement défensif en fonction de l'intensité de la perturbation.


Caracara à gorge rouge (Ibycter americanus)
attaquant un nid de guêpes Polybia jurinei, camp des Nouragues (Guyane), avril 2010.
Source : image extraite d'une vidéo publiée sur PLOSOne par McCann et al

Deux grandes espèces de guêpes, dont Polybia jurinei, ont été vues attaquant (et certainement
piquant à plusieurs reprises) les caracaras, tandis que trois plus petites ne se sont pas
défendues.
Les attaques-éclairs des caracaras, au cours desquelles ils frappent fort et vite les nids et se
retirent aussitôt, semble réduire leurs risques de se faire piquer par les grandes guêpes.
Ils peuvent parfois coopérer pour augmenter encore leurs chances de succès.

Les attaques des caracaras et les perturbations expérimentales ont toujours entraîné plus ou
moins vite la fuite des insectes et donc l'abandon des nids.
Certaines guêpes attaquent certes les intrus durant une certaine durée (on a déjà vu une
Bondrée orientale être tuée suite à des piqûres trop nombreuses !), mais elles abandonnent
toujours si le prédateur est déterminé.

Cette technique de "guerre-flash" est aussi pratiquée par les bondrées qui attaquent parfois les
nids à plusieurs pour infliger des dégâts importants en peu de temps.

Dans les zones tempérées, les guêpes abandonnent moins facilement leurs nids car les
possibilités de refonder une colonie après un pillage sont faibles.
Au contraire, dans les zones tropicales, elles peuvent assez facilement créer une nouvelle
colonie et préfèrent abandonner les oeufs et les larves plutôt que de risquer de perdre de précieuses ouvrières.

D'autres espèces de guêpes diminuent les risques de voir leurs nids être détruits en les
camouflant, en les installant dans des enchevêtrement denses de branches ou à proximité
d'autres nids, ou bien en construisant une épaisse carapace de boue (guêpes du genre Pedotheca).

Deux composés extraits de l'épiderme des pattes des caracaras, la sulcatone et l'iridodial, ont
provoqué des réactions électrophysiologiques des antennes des guêpes.
Ces substances sont aussi présentes dans les sécrétions défensives de fourmis arboricoles du
genre Azteca.
Ces composés ne semblent toutefois pas constituer de répulsifs anti-guêpes et leur présence sur
la peau des rapaces pourrait s'expliquer par le fait qu'ils se sont posés au préalable sur des
arbres où vivent des colonies de fourmis Azteca.
Mais peut-être frottent-ils parfois ces fourmis sur leurs plumes ?

En conclusion, les Caracaras à gorge rouge parviennent à piller les nids de guêpes non pas grâce
à une protection chimique mais à leur technique d'attaque rapide et efficace